L'électorat de Bayrou, fort de ses 18%, représente une force importante. Dans le soucis de créer une majorité de démocrate et de progressiste en France, Ségolène Royal à proposé à F. Bayrou de débattre avec elle du pacte présidentiel. Après de nombreuses pression et changement de programme, ce débat inédit à pu avoir lieu sur BFM TV.
Loin d'ancrer Ségolène dans un parti centriste (ou Bayrou dans le PS), ce débat à permis de montrer les zones d'accord et de désaccord entre "le centre" et le pacte présidentiel.
Voici l'analyse du site lemonde.fr
Convergences, bonne humeur et courtoisie. Le débat inédit entre Ségolène Royal et François Bayrou s'est déroulé, samedi 28 avril, dans une ambiance détendue. Sur les réformes des institutions, la sécurité, la relance de l'Europe, la candidate socialiste et le leader centriste sont tombés d'accord. Sur les questions économiques, ils n'ont pas éludé leurs divergences, notamment sur la réforme des retraites ou le rôle de la Banque centrale européenne. Retour sur les thèmes évoqués lors du débat.
"Je n'attends pas un ralliement". Ségolène Royal a, la première, pris la parole, comme convenu entre les équipes de campagne. Elle a remercié François Bayrou d'avoir accepté le débat. "Plutôt que de parler de débat je préfère dire dialogue", a estimé la candidate socialiste. "Il se déroule en toute clarté", a-t-elle souligné, avant d'ajouter : "Il m'a semblé interessant de voir sur quels thèmes nous pouvons faire un bout de chemin ensemble". "Je n'attends pas un ralliement, car ce n'est pas ce qu'attendent les électeurs". "Mais, sur un certain nombre de sujets difficiles, nous pouvons faire émerger un certain nombre de convergences, qui vont permettre à la France de se redresser", a déclaré la candidate socialiste. Pour François Bayrou, "rien n'est plus nécessaire dans la vie politique française que de faire bouger les lignes". Il a rappelé "avoir dit à Nicolas Sarkozy qu'il était prêt à débattre avec lui." "De ce débat, il ne sortira pas de ralliement", a d'emblée précisé le leader centriste.
Convergence sur la réforme des institutions. Ségolène Royal a rappelé qu'elle met "au premier rang de la rénovation de la vie démocratique" la démocratie participative. Mais elle a aussi décliné ses propositions de IVème République : la suppression du 49-3, la réforme des institutions, les jurys citoyens. Elle a également souhaité l'organisation d'un référendum sur une nouvelle République.
François Bayrou a estimé qu'il fallait "bâtir le pluralisme". Il a rappelé son attachement à l'introduction d'une dose de proportionnelle aux législatives. Et sa volonté de réformer le Parlement, contre "la concentration des pouvoirs". Ségolène Royal a rappelé que ces propositions figuraient dans son Pacte présidentiel. Et ajouté qu'elle réformerait le Sénat, "pour y permettre l'alternance". Le candidat de l'UDF a lui aussi fortement critiqué les institutions de la Vème République, estimant que "ça suffit, les pouvoirs concentrés dans une seule personne".
Une loi contre la concentration des médias. François Bayrou a également rappelé ses critiques contre la concentration des médias, en soulignant les difficultés d'organiser ce débat. "A qui cela peut-il nuire, que comme candidats, nous discutions ensemble du pays ? " Ségolène Royal a affirmé que les mesures anti concentration des médias figurent dans son Pacte présidentiel. "J'ai dû mal lire", a plaisanté François Bayrou. Ségolène Royal et François Bayrou ont, tous deux, rappelé leur attachement à une loi qui change les règles sur ce point.
Un nouveau traité européen. François Bayrou a estimé qu'"une grande majorité de Français savent qu'il n'y a aucun avenir pour notre pays sans une Union européenne qui parle d'une voix forte dans le monde". Il a souhaité la mise en œuvre d'un nouveau texte constitutionnel européen "court, lisible". Une expression approuvée par la candidate socialiste, qui a estimé que "chacun sent bien que l'Europe doit d'abord défendre les valeurs humaines". Elle ajoute que l'Europe doit avancer sur les questions sociales et plaidé pour une réforme de la Banque centrale européenne.
Désaccords sur la politique économique européenne. Mais le président de l'UDF a fait part, pour la première fois depuis le début du débat, de deux désaccords. Selon lui, l'idée d'un smic européen "n'est pas sérieuse". De même, sur la Banque centrale européenne, il a exprimé son désaccord avec un euro faible, qui pourrait "affaiblir l'économie française". La candidate socialiste a, elle, estimé que le smic européen était un "principe" qu'il ne fallait pas abandonner. "C'est une question de protection des salariés", a-t-elle affirmé. Elle a également critiqué "la faiblesse de volonté politique de l'Union européenne" par rapport à la BCE.
La question de la dette. "Si on voulait schématiser le débat, on a des convergences du point de vue institutionnel, mais je suis en désaccord avec la vision économique de Ségolène Royal", a critiqué François Bayrou. Selon lui, les promesses de Ségolène Royal, sont "un déficit considérable pour nos dépenses publiques". Il a aussi estimé que donner de l'argent à certaines catégories de Français "ça ne marche pas".
"Sur les questions économiques, nous avons des désaccords", a concédé Ségolène Royal. Mais "je ne suis pas une femme de dogme", a-t-elle estimé, rappelant la démarche des débats participatifs qui ont constitué la première phase de sa campagne. La nouvelle croissance économique s'appuie sur "la compétitivité économique" mais aussi sur "la compétitivité sociale".
"Dans votre projet, vous en revenez trop souvent à l'idée que l'Etat peut faire les choses à la place de la société", a critiqué François Bayrou. "Vous êtes un excellent défenseur du Pacte présidentiel", a plaisanté Ségolène Royal, ajoutant que l"étatisme" n'était pas dans son projet. "Ce n'est pas l'Etat qui va faire la sécurité sociale professionnelle, ce sont les partenaires sociaux", a-t-elle précisé. "C'est en faisant des économies sur des dépenses mal orientées" que l'on va réformer, selon la candidate socialiste. "Toutes les dépenses publiques proposées dans le Pacte rapportent plus qu'elles ne coûtent", a-t-elle conclu.
35 heures. François Bayrou a reproché à Ségolène Royal d'avoir changé d'avis sur les 35 heures, en prônant une généralisation. "Je suis en désaccord sur ce point", a-t-il precisé. La candidate socialiste a rappelé que les 35 heures sont "un progrès humain considérable" et que leur application avait permis "une modernisation des entreprises." François Bayrou a estimé qu'"en dehors de la généralisation, les trois principaux candidats disaient à peu près la même chose" : aucun candidat n'a proposé l'abrogation de la loi sur les 35 heures, car "des entreprises et des familles ont trouvé un équilibre dans cette loi".
Retraites. Le candidat UDF a plaidé pour une nouvelle réforme des retraites, notamment des régimes spéciaux estimant qu'"il y a des inégalités trop lourdes". "Ceux qui pensent qu'on peut revenir sur la loi Fillon se trompent", a-t-il asséné. "Nous reviendrons sur la loi Fillon", a répondu Mme Royal, "parce qu'elle a créé des inégalités, notamment aux dépens des femmes". Ségolène Royal a rappelé son engagement d'augmenter de 5 % les petites retraites. François Bayrou l'a approuvé, en l'enjoignant à aller plus loin dans cette voie.
Relation entre la police et la population. Ces rapports "se sont aggravés", a souligné la candidate socialiste. Elle a critiqué la suppression de la police de proximité, proposant de mettre en place une police de quartier. Mme Royal a dénoncé le manque de moyens de la justice, qui doit sanctionner "de manière proportionnée", "dès le premier acte de déliquance".
François Bayrou s'est dit globalement en accord avec Ségolène Royal sur ces questions. Il a souligné la tension dans les rapports entre la police et la population, estimant que "cette montée des tensions est très nuisible pour la France". Il a estimé que "le fait de priver un certain nombre de quartiers de services publics" était "une faute".
Il a lui aussi souligné le besoin de s'en prendre aux primo délinquants. Sur les questions de la sécurité et de la prévention, Mme Royal et M. Bayrou sont tombés d'accord, le président de l'UDF critiquant implicitement Nicolas Sarkozy. "Ceux qui croient uniquement à la sanction se trompent", a-t-il par exemple affirmé.Carte scolaire. M. Bayrou s'est dit opposé à "la destruction de la carte scolaire". Mme Royal a dénoncé "le discours convenu sur l'égalité des chances", estimant que les familles savent déjà comment contourner la carte scolaire. Si elle a défendu la carte scolaire, elle a estimé qu'elle n'était qu'"un des éléments de la mixité scolaire".
Immigration. François Bayrou a de nouveau critiqué implicitement Nicolas Sarkozy sur la question du regroupement familial : "je ne veux pas en faire un de ces sujets qui cible une partie de ceux qui vivent sur notre sol".
Nucléaire. Le président de l'UDF s'est dit en désaccord avec Ségolène Royal sur cette question, estimant que seule l'énergie nucléaire permetterait à la France de respecter le protocole de Kyoto. Il s'est dit favorable à l'ouverture d'un débat sur l'EPR. Une précision approuvée par la candidate socialiste.
Identité nationale. François Bayrou a estimé qu'il n'avait pas le même "emballement" que Ségolène Royal pour le drapeau français. "Chacun honore son pays comme il l'entend". "La France ce n'est pas un signe extérieur, c'est des valeurs", a lancé le centriste.
Le Monde.fr
La réaction de Jean-Luc Mélenchon (qui représente l'aile Gauche du PS, il viens même de proposer la création d'un nouveau parti à gauche du PS) à été immédiate. "Pugnace et convaincante, elle n'a rien cédé sur ses propositions. Il n'a pas été question des ministres UDF et c'est parfait." Il à d'ailleurs écrit que Ségo a démontré "qu'elle avait raison de vouloir ce débat avec François Bayrou".
A ses yeux "le sol se dérobe sous les pieds de Nicolas Sarkozy. Il perd la main sur tous les plans et se fait marginaliser. Non seulement le débat a eu lieu en dépit de lui, non seulement ce débat permet un mouvement qui inverse la pente dans le sens de Ségolène Royal mais de surcroît la candidate socialiste a gagné en crédibilité aux yeux de tous".
La gauche reste ainsi la gauche. Cependant, il faut créer une force suffisante pour empêcher la destruction du système social français qui nous guette si Sarko devait être élu président. Les électeurs de Bayrou ne peuvent pas se retrouver dans le programme de Sarkozy. Même si nous ne sommes pas d'accords sur tout, seul la gauche peut permettre à tout le monde de s'exprimer et ne verrouille pas la démocratie dans les mains d'un seul homme!