Les syndicats et le Parti socialiste ont vivement protesté, vendredi 28 décembre, contre la suggestion du Premier ministre François Fillon d'adopter un temps de travail plus "adaptable". Selon le PS, le gouvernement cherche à "abolir la durée légale du travail".
Jeudi, le Premier ministre a demandé aux partenaires sociaux de réfléchir à la possibilité de remonter, par accord négocié, le seuil de déclenchement des heures supplémentaires.
"Le Premier ministre vient de dévoiler le véritable projet du gouvernement qui est purement et simplement l'abolition de la durée légale de travail par des accords négociés entreprise par entreprise", s'indigne, dans un communiqué, Stéphane Le Foll, directeur du cabinet de François Hollande.
" Travaillez plus, il n'en restera rien "
Reculer le seuil de déclenchement des heures supplémentaires revient à "dévaloriser les heures travaillées en plus qui deviendront des heures de travail 'normales' rémunérées sans plus aucune majoration de salaires", estime-t-il. "Au moment où le pouvoir d'achat des Français baisse, la nouvelle promesse qu'adresse Nicolas Sarkozy aux salariés est 'travaillez, travaillez plus, il n'en restera rien'", ironise le collaborateur de François Hollande.
De leur côté, Force Ouvrière, Sud et la CGT dénoncent également le projet du gouvernement. "Il y a une volonté sans le dire et un peu hypocrite de vouloir remettre en cause la durée légale en tant que telle et ce n'est pas acceptable", a réagi sur France Info le secrétaire général de FO, Jean-Claude Mailly. "Nous ne pouvons pas accepter que la durée du travail puisse être différente d'une entreprise à une autre, voire d'un salarié à un autre", avertit-il.
" Régression de plus d'un siècle "
Le Premier ministre "sait très bien que sur ces questions-là, la négociation ne pourra pas fonctionner. Donc d'une certaine manière, on fait semblant de nous consulter et après on passe en force", regrette Jean-Claude Mailly.
Pour sa part, Bernard Thibault, de la CGT, dénonce, dans Libération, "la reprise quasi in extenso de la revendication du Medef" par le gouvernement."Il est évident que le gouvernement prend fait et cause finalement pour la position patronale", a lui aussi relevé Jean-Christophe Le Duigou, secrétaire confédéral CGT sur France Inter. "La remise en cause de la notion de durée légale du travail commune à l'ensemble des salariés serait sans doute une régression de plus d'un siècle. Dans une même localité, vous verrez les directions d'un supermarché qui négocieront une durée légale pour leurs salariés et tel autre qui négociera autre chose. Forcément, le patronat mettra en concurrence les salariés pour obtenir le maximum de concessions sur la durée du travail et cela deviendra vite intenable", s'est-il emporté.
" Mouvement d'ensemble des salariés "
Dans un communiqué, l'Union syndicale Solidaires (syndicats Sud) s'insurge aussi contre un gouvernement "au service du Medef (patronat)": "c'est une régression sociale majeure qui se prépare. Le gouvernement ne reculera que contraint et forcé", estime Sud. Le syndicat invite à "créer rapidement les conditions d'un mouvement d'ensemble des salariés du privé et du public".
Sud note également qu'une éventuelle remise en cause de la durée légale du travail "aurait pour conséquence de vider de tout contenu la récente loi sur les heures supplémentaires puisqu'elle aboutirait à ne plus considérer les heures travaillées au-delà de 35 heures comme des heures supplémentaires qui ne seraient donc plus défiscalisées".Le gouvernement a publié jeudi, un document d'orientation, sur les points qu'il souhaite voir aborder dans le cadre d'une négociation nationale interprofessionnelle en 2008. Dans ce document, Matignon demande, notamment, aux partenaires sociaux de se prononcer sur ce qui, en matière de durée du travail, doit être fixé par la loi, par accord collectif ou par accord individuel. Patronat et syndicats sont invités à conduire une négociation rapide d'ici au 31 mars, avant que le gouvernement ne légifère.